lundi 21 décembre 2009

L’avatar du 7ème art

J’ai été voir « AVATAR ».
C’est une allégorie sur la guerre d’Afghanistan.

Tout est surréaliste. D’évidence, le scénariste n’a jamais mis les pieds dans les montagnes d’Asie Centrale où il imagine d’invraisemblables forêts tropicales peuplées d’animaux monstrueux et de plantes qui parlent. Il n’a pareillement jamais rencontré de Pachtouns car il les affuble d’une queue bizarre sous une burqua transparente et d’une tresse i-phone sous le turban. Le « Hamid Karzaï » de la bande est attifé d’un pagne et de boucles d’oreilles ridicules.

Le synopsis est tiré par les cheveux.
Sous un arbre où campent des Afghans, il y a un gisement de métalpognon convoité par la Dowejones Co mais qui est protégé par des écolos-empêcheurs-de-tourner-en-rond. L’US Army bonne fille, accepte de suspendre ses opérations, le temps que « Amérique-écologie » dépêche un médiateur. Le héros, par la magie d’un sarcophage de laboratoire, se transforme le jour en authentique Afghan et la nuit, pendant son sommeil, il redevient un « good guy » l’instant de rendre compte des succès de sa mission et de bouffer un Big-Mac. Le vrai-faux Pachtoun réussit tant bien son infiltration-assimilation-intégration qu’il épouse la fille d’Ousama et devient chef de tribu. Hélas, il ne parvient pas à convaincre ses nouveaux amis d’abandonner leur arbre. Alors, bien que n’ayant pas lu Corneille il trahit les siens. L’amour et le pouvoir lui donnant des ailes, le voici enfin chevauchant un aigle qui ressemble à un dindon, pour mettre en déroute l’armée du méchant colonel.
« The end ».

Je me suis distraitement ennuyé. Des gens dans la salle ont applaudi. Drôle de drame !

Retour à la maison où m’attendait sur le guéridon le dernier Filiu. Jean-Pierre est un diplomate souriant, Français de bonne souche mais sachant l’arabe. Il enseigne en toute simplicité l’Orient compliqué à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris (anciennement et nouvellement Sciences Po). Dans son dernier bouquin, il se saborde et dépose le bilan de son fonds de commerce. Il proclame en effet qu’Al Qaïda est en déclin. L’organisation n’existe plus qu’à travers le net, son audience reste grande parmi les infidèles mais elle est nulle chez les musulmans. Au fond Binladen ne serait qu’un « avatar » ? C'est-à-dire selon la définition du dictionnaire informatique : « l’incarnation numérique d’un individu dans le monde virtuel » ? Ou l’inverse ? Pour moi ça se défend.

Cette pensée cynique m’a empêché de poursuivre ma lecture. Je voyais trouble. J’ai changé de lunettes et troqué l’ami Filiu pour Caroline Pigozzi.

La journaliste de Match est allée interviewer une vingtaine de cardinaux aux quatre coins du monde. Son reportage de cinq cents pages « Les robes rouges » se déguste comme une friandise de chez Hermé. C’est la découverte de saveurs inconnues. Je m’invite tour à tour chez le primat des Gaules, le Patriarche des Chaldéens, chez Messeigneurs Poupard, Maradiaga, Scola, Puljic… révélation des princes de l’Eglise. Ils sont actifs, avides de savoir, polyglottes, musiciens, pilotes, leur vision du monde est à l’image de leur vie : singulière. Et puis surtout, ils ont apparemment conservé des vertus en voie de disparition : le détachement, l’humour, la joie de vivre. Il y a une photo de Philippe Barbarin avec des moines et des religieuses qui tous ensemble rient aux éclats. C’est à vous donner faim de foi !

Je songe à l’avatar du septième art où les humains et les humanoïdes sont des pisse-vinaigre. « Les robes rouges » porté à l’écran, ça ferait un bide, mais combien bien plus marrant.

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